Après une nuit mouvementée, remplie de réflexions et de rêves étranges, Nour avait finalement pris sa décision. Ce matin-là, elle s’était réveillée chez ses parents, chez qui elle avait passé la nuit pour leur confier la garde de sa fille pendant la soirée de la veille.
Au petit-déjeuner, elle s’assit avec sa famille autour d’une table garnie de spécialités libanaises. Il y avait des mana’ich au zaatar encore tiède, des olives marinées, du labné accompagné de concombres croquants, qu’ils partageaient en riant. Tout en sirotant son café, elle demanda à son père de déposer sa fille à l’école. Elle devait récupérer sa voiture au garage, puis partir directement au travail.
Après un rapide au revoir, elle quitta la maison familiale, bien décidée à affronter la journée qui s’annonçait.
En arrivant au bureau, l’atmosphère était calme, presque paisible. Quelques employés présents la saluèrent d’un sourire et d’un signe de tête. Nour posa ses affaires, ajusta les papiers sur son bureau, puis attendit patiemment l'arrivée de Jad, ses pensées en ébullition sous un masque d’apparente tranquillité.
Enfin, elle aperçut Jad entrer. Comme à son habitude, il salua rapidement l’équipe, ses gestes pleins d'assurance, mais ses traits fatigués trahissaient les restes de la soirée de la veille. Il se dirigea directement vers son bureau.
Prenant une profonde inspiration, Nour se leva et alla frapper à la porte.
— « Entrez, » répondit Jad d’un ton neutre.
Elle ouvrit la porte et entra. Jad releva les yeux vers elle, et malgré son effort évident pour rester impassible, elle perçut une lueur d’intérêt dans son regard, comme s’il espérait quelque chose.
— « Bonjour, Jad, » dit-elle d’une voix calme.
— « Bonjour, Nour. » Il lui adressa un sourire léger, se redressant légèrement dans son fauteuil. « Tu voulais me parler ? Assieds-toi. »
Elle prit place en face de lui, s’efforçant de contrôler les battements de son cœur. Jad semblait essayer de ne pas trop la regarder, mais ses yeux s’attardaient malgré lui sur les traits de son visage, sur ses cheveux, sur la courbe de ses lèvres. Nour inspira doucement avant de se lancer.
— « Jad, j’ai pris ma décision, » dit-elle finalement.
Un court silence s’installa, et Jad sentit son estomac se nouer. Il espérait qu’elle allait lui annoncer qu’elle voulait donner une chance à leur relation, qu’elle avait changé d’avis.
— « Quelle décision ? » demanda-t-il, essayant de dissimuler la nervosité dans sa voix.
Elle soutint son regard, son expression empreinte de sérieux.
— « Je démissionne. »
Le choc passa dans ses yeux en une fraction de seconde.
— « Quoi ? » lâcha-t-il, son ton plus bas qu’il ne l’aurait voulu.
— « Oui, Jad, je démissionne. Je pense que c’est mieux pour tout le monde. »
Il cligna des yeux, essayant de comprendre. La détermination dans ses mots le troublait ; il n’avait pas anticipé une telle décision.
— « Et pourquoi donc ? » demanda-t-il, la gorge serrée.
— « Parce que... parce que je veux me concentrer sur ma carrière, et je sens que ça ne va pas être possible avec ce qui s’est passé entre nous. » Elle fit une pause, cherchant ses mots. « Je ne veux pas de relation en ce moment. »
Il eut un pincement au cœur en entendant ces mots, mais tenta de rester impassible.
— « Tu veux dire que... » Il inspira lentement. « Tu veux dire que la nuit qu’on a passée ensemble était une erreur ? »
Elle baissa les yeux, prenant une brève inspiration pour rester calme.
— « Non, je n’ai pas dit ça. Au contraire. » Elle releva les yeux vers lui, ses pupilles brillantes de sincérité. « Mais là, actuellement, je ne veux pas de relation amoureuse. Je veux juste... me concentrer sur ce qui est mieux pour ma fille et moi. Je suis consciente que ça ne va pas être facile ici. »
Les mots de Nour pesaient dans l’air, et Jad s’efforçait de les comprendre.
— « Mais pourquoi ? » demanda-t-il, l’inquiétude perçant dans sa voix. « À cause de moi ? »
Elle resta silencieuse, puis finit par acquiescer.
— « Oui, non… en fait oui, » répondit-elle, sa voix à peine plus qu’un murmure.
Le regard de Jad se fit plus intense. Il passa une main dans ses cheveux, déconcerté, presque peiné. Il prenait enfin la mesure de l'impact de ses sentiments sur elle.
— « Nour, si c’est à cause de moi, alors ne t’inquiète pas. » Il adoucit son ton, essayant de contenir l’émotion qui montait en lui. « Je ne vais plus te déranger. J’ai compris, et... je suis un grand garçon. Tu peux rester. Tu fais partie intégrante de cette équipe, et tu es brillante dans ce que tu fais. »
Un silence accueillit ses paroles, et Nour le regarda, touchée par ses mots.
— « Je ne sais pas, Jad... »
Jad, poussé par une impulsion qu’il ne pouvait plus contenir, se leva et se dirigea vers Nour. En quelques secondes, il tira une chaise et s’assit en face d’elle. Il se pencha légèrement, ses yeux cherchant à capter les siens.
— « Nour, fais-moi confiance. Je te promets, je ne vais plus te déranger avec cette histoire. »
D’un geste lent, presque hésitant, il prit doucement ses mains dans les siennes. Son regard était à la fois suppliant et sincère, comme s’il cherchait à briser une barrière invisible entre eux. Ses mains étaient chaudes, enveloppantes, et Nour sentit un étrange mélange de réconfort et de vulnérabilité à ce contact.
Elle hocha la tête, son expression mêlant une pointe de doute et une lueur de gratitude. Le choix était toujours difficile, mais ses mots faisaient naître en elle une hésitation nouvelle.
Sentant un brusque regain de lucidité, elle se ressaisit et retira doucement ses mains des siennes. Elles étaient très chaudes, comme si elles enveloppaient les siennes pour les protéger, et cette chaleur lui manqua immédiatement.
— « D’accord, » murmura-t-elle finalement. « Je vais y réfléchir. »
Jad prit une profonde inspiration, les yeux fixés sur elle, déterminé à la convaincre.
— « Nour, ne réfléchis pas. Je te promets, pour moi, le sujet est clos. Juste… dis oui. »
Elle le regarda, déconcertée par la sincérité dans sa voix, les mots qu’il prononçait avec une conviction presque désespérée. Ils se regardèrent un instant, chacun luttant contre les pensées qui bouillonnaient sous la surface. Elle finit par acquiescer, se levant lentement.
— « Très bien, » murmura-t-elle en tournant les talons, sans se retourner.
Alors qu'elle quittait son bureau, Jad sentit encore la chaleur de sa présence. Il se demanda si, malgré toutes les promesses qu’il venait de lui faire, il réussirait vraiment à tenir cet engagement.
Est-ce que Jad va tenir sa promesse ???? Hmmmm ? Je n'y crois pas trop ^^